lundi 15 août 2011

L'entrée par la gouvernance : 4 sous axes

L’entrée par la gouvernance s’articule autour de 3 sous-axes :

1. Interrogation sur la pertinence des échelles territoriales et des changements et dispositifs institutionnels - Equipe de l'INAU - Rabat


Territorialisation par le haut et territorialisation par le bas.
Partant des différents niveaux et échelles institutionnelles d’encadrement du milieu rural, nos interrogations sont axées aussi bien sur les moyens (endogènes) utilisés par les acteurs locaux  dans leurs adaptations aux impulsions externes que sur les dispositifs de territorialisation de départements sectoriels (agriculture, tourisme, etc.) ou de grandes infrastructures (ports, autoroutes..) dans leurs articulations aux acteurs locaux (structures élues, population..).

Dans un premier volet
Partant de la plus petite échelle en milieu rural (le douar) et sa prise en compte dans les dispositifs institutionnels d’organisation de l’action publique, comment il s’affirme comme lieu d’expression d’une demande sociale par opposition /articulation à l’espace communal ?

- La Commune Rurale ; outre ses capacités d’actions et les logiques qui la traversent, quelle est  sa réalité en tant qu’espace d’interaction et d’identité. (à quels moments pourrait-elle jouer un rôle dans la formation d’un projet de territoire ? dans quels cas a –t-elle pu le faire ?.)
- La province ; espace essentiel de la déconcentration au Maroc, fait-il territoire ? S’il bénéficie d’un acteur essentiel de coordination (le gouverneur), jusqu’où les départements « s’autonomisent » économiquement (suivi des expériences de ceux de la santé et de l’éducation) ? Avec les nouvelles dispositions de l’INDH, comment se repositionne la Province comme collectivité locale ?
- La région ; une échelle encore émergente mais des expériences probantes montrent le dynamisme de certains  acteurs régionaux (Souss Massa Draa).De quelles capacités endogènes bénéficie-t-elle pour s’arrimer à la mondialisation ? Jusqu’où le cadre institutionnel influe sur le déploiement de ces capacités (découpage et limites en relation avec les « pays » et les identités locales, mode de désignation des élus, ressources et espace d’interaction) ?

      Dans un second volet
      Outre les capacités de territorialisation par les instances locales et régionales, il restera à interroger les logiques développementalistes de découpage spatial par le projet, l’espace-plan et/ou l’espace-projet et son articulation à l’espace institutionnel. (PATRO, bassins-versants, espace litorral, espace oasien,…). Le problème des espaces à cheval sur plusieurs provinces ; quelles instances de gestion, comment se comportent les différents niveaux institutionnels (CR, Province, région).Tanger/med, plan bleu et zones touristiques, bassins versants, PATRO, PERG, PNRR, PAGER construisent des espaces de projets qui doivent par la suite s’adapter aux institutions locales.

      Interroger les cadres territoriaux reste une entrée qui dépasse les différentes approches disciplinaires de la gouvernance (par le politique et l’institutionnel ; système de prise de décision et pouvoirs,  par l’économique ; l’acteur/payeur, par le social ;mode d’expression de la demande sociale,  la participation des populations) pour les interroger à l’aune des cadres  territoriaux de l’action de chacun des acteurs. La recherche se situe alors dans des mises en adéquation entre ces différents cadres, permettant de déceler les territoires pertinents du développement.

      Dans ce sens, tous les travaux des différentes équipes de RELOR alimenteront cet axe ; la territorialisation par la question de l’environnement, par le développement touristique, par l’institutionnel ou par les pratiques et territorialités des populations versera vers cette articulation entre le haut et le bas.
        Les orientations et travaux pour les années à venir ;
         1/ Plus particulièrement, l’équipe de l’INAU prévoit une capitalisation d’expériences (en s’appuyant sur les acquis de plusieurs années d’investigations menées sur le milieu rural au Maroc) et propose une lecture théorique du devenir de la société rurale marocaine en privilégiant comme entrée principale les paradigmes de « l’espace » et du « territoire » en relation avec l’espace du quotidien des populations rurales et l’étude des mobilités.

        2/ Les nouvelles interrogations se situeront au niveau des institutions régionales et des espaces de projet (menés de plus en plus par des structures ad hoc). Les régions de Tanger-Tétouan et de Souss Massa Draa seront interrogées dans ce sens.

        3/ L’instance régionale sera interpellée au niveau de ses outils de programmation et de planification ; l’équipe  envisage l’accompagnement d’un SRAT (pour la Région Tadla-Azilal qui met en avant l’idée « d’appel à projets » et de « projets de territoire » comme démarche nouvelle dans l’aménagement du territoire) et le suivi des SRAT en cours dans leur mise en œuvre.

        4/ Enfin, l’Initiative nationale de développement humain (INDH) a introduit de nouvelles procédures qui recomposent les relations entre les différents acteurs du local (conseil communal/ONG, Commune/Province, public/privé…. ). Un suivi de certaines communes de la périphérie de Casablanca permettra de mieux appréhender les changements en cours, notamment ceux visant les appels à projet avec participation des ONG en relation avec les modes de faire, pratiques et besoins  des populations.


        2. L’approche territoriale de la mise en tourisme de l’espace rural - E3R - Rabat


        Le lancement par le Maroc du nouveau plan de développement touristique basé sur le produit balnéaire à travers le Plan Azur, s’accompagne d’un politique ciblé de développement de tourismes de niches parmi lesquelles le tourisme rural tient une bonne place. Conçu comme un moyen de générer des sources de revenus supplémentaires en milieu rural, ce nouveau tourisme fait l’objet de nombreuses tentatives, menées parfois de façons désordonnées et peu méthodiques.

        Associée par le Ministère du Tourisme à une réflexion pour mettre au point une stratégie pour le développement de ce tourisme, la E3R a continué à travailler à l’occasion de divers projets de recherche sur cette thématique. C’est ainsi que dans le cadre du projet fédérateur I du RELOR, l’équipe a consacré un des sous-thèmes des recherches menées dans la région d’Essaouira à la mise au point d’une méthodologie de mise en tourisme de l’arrière-pays de cette ville. En effet, bien que le projet initial devait porter sur la zone côtière, autorités locales et collectivités locales ont souhaité une réflexion sur les possibilités d’orienter une partie de la demande touristique naissante vers l’intérieur afin de baisser quelque peu la charge sur le littoral, objet de l’étude, et diffuser quelque peu les retombées en milieu rurale. Le résultat de cette recherche a aboutit à la nécessité de territorialiser le développement de ce tourisme rural et une méthodologie appropriée a été testée[1].

        Pour une territorialisation du développement du tourisme rural
        Pour concrétiser son développement, le tourisme rural devrait à notre sens faire l’objet d’une approche territoriale. L’objet de cette recherche est de définir cette approche et de la tester en l’appliquant à divers terrains. Cette approche territoriale nécessite une clarification de l’unité spatiale d’intervention. Celle-ci tourne autour des notions de terroir et territoire, suppose une multitude d’intervenants et s’appuie sur un processus de patrimonialisation.

        Pays légal et pays réel : Quelle dimension spatiale pour la mise en tourisme de l’espace rural ?
        Il s’agit de savoir quel sera le cadre spatial qui servira de support à l’élaboration, la concrétisation et l’intégration locale des projets touristiques. La tendance immédiate des décideurs et des aménageurs est de considérer le maillage territorial officiel plus ou moins dense que ce soit la commune, le cercle, la province ou la région. Souvent, l’acteur principal du développement touristique est l’administration des Eaux et Forêt et dans ce cas le parc naturel régional ou national est considéré comme l’unité spatiale exclusive pour l’implantation des projets. Or, outre les conflits de compétences et d’intérêts[2] entre les différentes administrations et collectivités qui portent ces projets, ces territoires administratifs manquent de cohérence sur le plan touristique et correspondent rarement aux contours d’un espace touristique pertinent. Par ailleurs le tourisme est une activité transversale dont l’espace de production et de consommation ne s’inscrit pas obligatoirement dans la logique et le cadre des « bassins d’emploi et de vie » des pays. De ce fait il est très délicat de faire correspondre le projet de mise en tourisme de l’espace rural aux territoires administratifs.

        Un diagnostic basé sur une analyse fine du territoire et portant sur la pertinence touristique, le potentiel et les spécificités du milieu, l’image de l’espace, etc. devrait permettre de tracer les limites d’un territoire donné à valoriser. Cette délimitation explorera les possibilités de recompositions spatiales souples et volontaires en tenant compte des contraintes et des opportunités des territoires administratifs ou de projets. Dans le travail de délimitation on peut privilégier un certain nombre de partis pris. Il s’agit tout d’abord de la souplesse en proposant des limites plus ou moins floues volontairement car amenées à évoluer en fonction de la volonté des acteurs voisins et porteurs de projets à se joindre au projet territorial. Il s’agit ensuite de la complémentarité en proposant un pays touristique qui englobe à la fois les stations touristiques balnéaires existantes ou à créer et les centres d’intérêt relevant plus du tourisme rural. Ou encore de la structuration en réseau privilégiant l’organisation, la cohérence et la mise en réseau des sous-espaces touristiques. Il s’agit de pragmatisme en tenant compte de la proximité de zones d’émissions de touristes et de la volonté d’un partenariat fondé sur une démarche libre, volontaire, concertée et contractuelle

        Territoire ou terroir
        L’un des critères fondamentaux de cette délimitation de l’espace qui doit être mis en tourisme est basé sur la notion de territoire, qui est cet espace terrestre sur lequel vit et auquel s’identifie un groupe humain. Mais dans cette délimitation, la notion de terroir est également fortement présente. Plus que la dimension naturelle[3] de cette notion, c’est la notion de terroir vécu et terroir perçu qui est ici visée. C’est en effet, cette notion de région rurale, provinciale, considérée comme influant sur ses habitants (accents du terroir) que complète celle de terres d’une même région fournissant un produits agricole caractéristique (vigne, olives) avec un goût particulier dû à la combinaison du terrain et du climat qui sont ici privilégiées. A cela sont combinés des pratiques culturales, des petits outils, des petits métiers ruraux, bref des biens et des savoirs susceptibles d’être patrimonialisés et de constituer une valeur ajoutée faisant la spécificité du terroir à valoriser par rapport à un autre.

        Un processus de patrimonialisation
        Dans cette démarche de construction d’un produit de tourisme rural territorialisé, le processus de patrimonialisation occupe une place primordiale. Rappelons ici que patrimonialiser un bien ou un savoir c’est lui donner du sens. Une construction quelconque (ou une pratique culturale ou artisanale) ne peut être considérée en soi comme un élément patrimonial. Elle ne peut revêtir un caractère patrimonial que par rapport à sa valeur esthétique dans un paysage, sa technique de construction ou son lien avec l’histoire locale. Ce bien particulier une fois patrimonialisé, devient un bien commun avec une valeur collective d’où la nécessité de l’adoption d’une démarche participative dans ce processus. Les produits du terroir et les savoir-faire locaux constituent les composantes du patrimoine rural local. L’intégration de ce patrimoine dans le produit de tourisme rural local suppose que l’on identifie sa valeur sociale, culturelle et économique en le connaissant et en le faisant connaître et reconnaître comme objet patrimonial pour ensuite assurer sa sauvegarde et lui affecter éventuellement une nouvelle vocation dans le cadre du projet de montage du produit de tourisme rural.

        Une multitude d’intervenants
        Une autre particularité du tourisme en milieu rural renvoie à la multitude d’intervenants déjà mentionnée plus haut. Apparu de façon plus ou moins spontanée que ce soit au niveau de la demande ou de l’offre, le tourisme en milieu rural fait appel à plusieurs acteurs. Il peut être initié par le Ministère de tutelle, mais son développement est souvent porté par le mouvement associatif local qui s’active dans le développement local et qui y voit un secteur pouvant générer des revenus supplémentaires sans grands frais. Il peut également être porté par les initiatives des agences de développement, des ONG internationales, des bailleurs de fonds qui, cherchant des niches pour financer des actions de développement local optent pour le tourisme rural. Il fait également appel à plusieurs individus qui contrairement aux acteurs du tourisme classique, ne sont pas formés pour le pratiquer, l’associent à d’autres activités principales comme l’agriculture ou l’élevage : populations offrant des moyens d’hébergement et de restauration, jeunes guides officiels ou non, commerçants et bazaristes. Ajoutant à tous ces intervenants les responsables locaux et régionaux, les instances de développement (Autorités locales, conseils régionaux, Centres d’investissements, Conseils Régionaux du Tourisme, etc.) ainsi que la population dans son ensemble qui est plus en contact avec ce tourisme qu’avec le tourisme classique. Tout cela fait que l’offre du tourisme rural même dans les pays avancés dans ce domaine est parfois atomisée et éclatée entre une multitude d’opérateurs. Chez nous où elle est encore à ses balbutiements, elle ne pourra s’imposer que si des structures locales et régionales sont mises en place pour amener les différents intervenants à coordonner leurs actions.
        En tenant compte de tous ces préalables, un concept de base pour le développement du tourisme en milieu rural au Maroc basé sur une démarche territoriale sera mis au point.

        Terrain
        Le choix de régions représentatives de contextes géographiques, économiques et culturels différents et représentatifs du Maroc multiple, permettra de mettre en place des équipes pour effectuer des diagnostics territoriaux permettant le montage de ces produits. Une série d’investigations portant sur différentes régions devront aboutir à la délimitation de territoires pouvant servir de base à un développement du tourisme rural. Le partenariat avec des ONG, des associations de développement local et le Ministère du Tourisme est ici privilégié. A titre provisoire les régions retenues couvrent le Rif et Pré Rif, le Moyen Atlas, le Haut Atlas occidental (Pays d’Ida ou Tanane) et la région du Dra.


        3- Gouvernance du territoire : Approche participative et développement local - Equipe du laboratoire GEDEZA - Agadir


        Après une phase où l'approche participative, en tant que démarche d'élaboration et de mise en œuvre de projets de développement, était souvent imposée par les initiateurs ou les bayeurs de fonds internationaux. Actuellement, après a multiplication des expériences, cette approche est largement répandue et adoptée par les différents acteurs de développement. En peu de temps, ces acteurs sont arrivés à admettre communément que toute conciliation entre la conservation des ressources naturelles et la promotion des territoires et des sociétés ne peut se faire sans l’implication de tous les acteurs concernés. De ce fait "la participation des concernés" figure souvent comme un soubassement fondamental pour tout projet de développement.

        La "participation" souhaitée dans ce contexte ne doit pas être considérée dans une acception de simple réception de bénéfices, ni de contribution ni même de consultation / concertation. Elle doit être perçue dans le sens d’une véritable autopromotion des entités socio-spatiales en question ; c'est-à-dire un contexte où ce sont les concernés qui constituent les meneurs du processus de planification de leur propre développement et détiennent le pouvoir de décision quant à l’avenir de leur territoire.
        Au niveau du Maroc et principalement dans les régions du Sud, cette approche de travail a été souvent "imposée" dans les projets de développement initiés dans le cadre de la coopération internationale. La participation des "bénéficiaires" est devenue une des exigences de base pour les institutions de financement dans la coopération bilatérale et multilatérale. L'approche participative est de plus en plus reconnue comme une démarche facilitant largement le diagnostic et l'analyse territoriale, la planification des actions, la réalisation et le suivi des objectifs communs dans le contexte d'un développement local et durable. L'avènement de l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) ne pourra que renforcer les expériences acquises.

        Ces expériences, d’une importance cruciale pour atténuer les difficultés des populations en terme d'infrastructures de base et de services de proximité, sont réalisées généralement dans un contexte local ont besoin  aujourd'hui d'être inscrites dans une stratégie plus ambitieuse de dimension régionale voire nationale. Une telle perspective implique une re-définition des relations de partenariat entre les acteurs locaux et régionaux, et ouvre pour l’Université un large champ de réflexion et de recherche, mais aussi d'accompagnement et d’appui aux acteurs du développement local.
        Pour suivre cette perspective relative à l'adoption des démarches participatives de travail en groupe dans les actions de développement, et pour s'inscrire dans la problématique du pôle de compétence Relor "Le retour du local et la gouvernance", nous proposons une action d'accompagnement et de recherche sur la participation et le développement local dans les Région du Sud marocain.

        En tenant compte de l’ensemble de ces considérations, le projet du Laboratoire "Géoenvironnement et Développement des Zones  Arides et Semi-Arides" (GEDEZA) et principalement de l'Equipe de recherche "Gestion des Ressources Naturelles  et le  Développement des milieux arides et semi-arides, sera axé autour de deux objectifs principaux suivants:
        • Mener une réflexion collective sur la problématique de l’approche participative, ses limites et ses ressources à travers l’examen d'une série d'expériences  menées dans les Région du Sud;
        • Contribuer aux efforts de formation et de renforcement des capacités des différents acteurs concernés par le développement local. Cette contribution s’appuiera sur l'organisation d'une série d'atelier de renforcement des capacités au profit des associations de développement, des élus locaux et des techniciens relevant des services externes concernés par des actions de développement local:
        • Contribuer à la généralisation et faire bénéficier les Provinces du Sud des résultats réussis et des bonnes pratiques confirmées par les expériences de développement participatif;
        • Accompagner l'INDH et les efforts de la mise en place d'un processus Agendas 21 Locaux en cours d'élaboration au niveau des chefs lieux des Provinces de la Région de Guélmim-Essmara





        [1] Voir également M. Berriane, « De la nécessité d’une approche territoriale pour le développement du tourisme rural au Maroc, in A. Iraki (coord.) Développement rural, pertinence des territoires et gouvernance, publications de l’INAU et du RELOR, pp. 83-95
        [2]) voir par exemple, à propos de la formation des guides et autres accompagnateurs, les problèmes de coordination entre le Ministère du Tourisme, le Ministère de l’Intérieur, les Eaux et Forêts, les Associations de développement local que financent des ONG internationales
        [3]) Unité d’espace naturel définie par un ensemble de caractéristiques mésoclimatiques, topographiques, géologiques, pédologiques et agrologiques conditionnant des aptitudes agricoles particulières des terrains ainsi que des qualités spéciales des produits.

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